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La décision est tombée et provoque une onde de choc. Marine Le Pen a été condamnée à quatre ans d’emprisonnement, dont deux ans ferme aménageable sous surveillance électronique, 100 000 euros d’amende et cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire (et donc une application immédiate même s’il y a appel), par le tribunal correctionnel de Paris, lundi 31 mars, dans l’affaire des assistants parlementaires du Front national (devenu Rassemblement national). Elle perd donc son mandat local de conseillère départementale du Pas-de-Calais, mais peut rester députée. « Nous allons faire appel », a annoncé son avocat.
Ce jugement est proche des réquisitions du parquet à l’issue du procès qui s’est tenu du 30 septembre au 27 novembre. Le ministère public avait réclamé à l’encontre de la cheffe de file des députés du parti d’extrême droite une peine de cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire, en plus de cinq ans de prison, dont deux ans ferme, et 300 000 euros d’amende. Ce jugement bouleverse la carrière politique de Marine Le Pen, triple candidate malheureuse à l’Elysée, et l’empêche de fait de se présenter à l’élection présidentielle de 2027, sauf si une décision favorable en appel intervient avant cette échéance. Elle a quitté la salle d’audience avant même d’entendre la peine prononcée à son encontre, le tribunal ayant annoncé, avant le détail des peines, qu’il condamnait tous les prévenus élus à une peine d’inéligibilité au vu de « l’atteinte aux règles du jeu démocratique ».
La présidente, Bénédicte de Perthuis, a également justifié la nécessité de l’assortir d’une exécution provisoire pour certains prévenus au regard de « la gravité des faits », des « montants détournés » – plus de 4 millions d’euros – et du « rique de récidive », « objectivement caractérisé ». « Dix ans après », les prévenus « n’ont exprimé aucune prise de conscience de leur violation de la loi », a souligné la magistrate lors de la lecture de ce jugement, qui a duré plus de deux heures.
Pas de « régime de faveur »
Le tribunal a également mentionné le « risque de trouble majeur à l’ordre public » avec le fait que « soit candidate, notamment à une présidentielle, voire élue, une personne déjà condamnée en première instance ». Il faut « veiller à ce que les personnes élues ne bénéficient pas d’un régime de faveur », a observé Bénédicte de Perthuis. « Je pense que la volonté du parquet est de priver les Français de la capacité de voter pour ceux qu’ils souhaitent », c’est « ma mort politique qu’on réclame », avait réagi après le réquisitoire Marine Le Pen, qui se croyait jusque-là protégée par la possibilité de faire appel.
Selon le tribunal, la leader du parti d’extrême droite « s’est inscrite avec autorité et détermination dans les pas de son père » [Jean-Marie Le Pen] dans ce « système global et systématique » mis en place pour utiliser les enveloppes de 21 000 euros par mois auxquelles les députés européens avaient droit. Et ce pour rémunérer des assistants parlementaires aux « contrats fictifs » qui travaillaient en réalité pour le parti « en vue de faire des économies importantes ». Même s’il n’y a pas eu d' »enrichissement personnel », le jugement retient un « enrichissement partisan certain », avec une « rupture d’égalité » au détriment des autres partis et un « contournement démocratique ».
Le parti, poursuivi comme personne morale, a ainsi écopé d’une peine de 2 millions d’euros, dont un million ferme, et une confiscation de 1 million d’euros saisis pendant l’instruction. Vingt-quatre autres prévenus étaient jugés aux côtés de la cheffe de file des députés du RN, dont huit anciens députés européens, jugés pour détournement de fonds publics.
franceinfo