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Pour rappel, convoqué le mercredi 18 juin 2025, il a été entendu et gardé à vue à la préfecture de police d’Abidjan. Ce, pour sa sortie dans la presse le mardi 17 juin 2025. Pour se retrouver dans cette situation difficile, Joël N’Guessan a pointé du doigt les magistrats qu’il a accusés d’être à l’origine de certaines décisions d’exclusion.
Dans une interview accordée à un média en ligne et reprise par la presse écrite le 18 juin, Joël N’Guessan a vivement exprimé l’exclusion de certains acteurs politiques de la liste électorale, pointant du doigt la responsabilité de certains magistrats. « Ce sont certains magistrats qui sont à la base de tous les problèmes que nous avons connus. Ce n’est pas moi qui ai décidé de ne pas délivrer un certificat de nationalité ivoirienne à Tidjane Thiam. Ce sont eux », a-t-il affirmé.
L’ancien ministre est allé plus loin, alertant sur les risques d’un nouveau cycle de violences électorales : « Si demain il y a des troubles, ce seront les magistrats les responsables, pas les hommes politiques. », a-t-il prévenu.
Ces propos ont sans doute provoqué l’ire des magistrats ivoiriens qui dans une récente déclaration assuraient travailler en toute indépendance. Faut-il le souligner, ces propos de l’ancien porte-parole du parti au pouvoir interviennent dans un contexte socio-politique marqué par des dénonciations récurrentes par l’opposition politique quant à l’impartialité de la justice ivoirienne en cette période électorale. L’appareil judiciaire est notamment soupçonné par l’opposition d’être « instrumentalisé » par le pouvoir à des fins politiques.
À un peu plus de 4 mois de la présidentielle d’octobre 2025, plusieurs figures de l’opposition, parmi lesquelles Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé ou encore Guillaume Soro sont exclus du processus électoral en raison de décision judiciaire controversée. Récemment, Tidjane Thiam, ancien CEO du Crédit Suisse et candidat désigné du PDCI-RDA pour cette élection, a également été exclu sur ordonnance judiciaire en raison de sa double nationalité au moment de son inscription sur la liste électorale. Réagissant à cette décision, il a dénoncé « une décision inique, injuste et incompréhensible ».
L’affaire Joël N’guessan intervient donc dans un contexte politique particulièrement tendu, où la question de l’inclusion de tous les candidats sur la liste électorale alimente déjà les débats. L’ancien ministre est désormais suspendu à la décision du parquet, qui devra dire si ces déclarations relèvent d’un simple droit d’opinion ou s’inscrivent dans une volonté délibérée de porter atteinte à la magistrature.
Affaire Joël N’Guessan : Communiqué du procureur de la République près le tribunal de première instance d’Abidjan.
Dans une interview accordée à un journal d’information en ligne, publiée le 18 juin 2025, et reprise par divers organes de presse, Monsieur N’GUESSAN Kouadio Joël, ivoirien, Ex-Ministre des Droits de l’Homme, a déclaré entre autres : « J’interpelle à cet effet, les Magistrats qui, au lieu de prendre des décisions liées à la justice, s’emploient essentiellement à exclure. Je vous fais remarquer que ce sont certains Magistrats qui sont à la base de tous les problèmes que nous avons connus. »
Et de poursuivre : « mais n’oublions pas que l’origine de cette crise, ce sont les décisions prises par les Magistrats. Ce n’est pas Joël N’GUESSAN qui a décidé qu’on ne délivre pas, en l’occurrence, un certificat de nationalité ivoirienne à TIDJANE THIAM. Ce n’est pas moi. Ce sont les Magistrats. Ça veut dire que si demain, il y’a des troubles dans le pays, les premiers responsables, ce sont les Magistrats. Ce ne sont pas les hommes politiques. »
Ces déclarations, qui jettent le discrédit sur des décisions de justice et sur l’institution judiciaire dans son ensemble, sont constitutives de faits prévus et punis par les articles 179-1° ; 190; 273 et 275 du Code Pénal.
Ce jour 19 juin 2025, Monsieur N’GUESSAN Kouadio Joël a été déféré au Parquet d’Abidjan, et une information judiciaire a été ouverte avec mandat de dépôt.
Le Procureur de la République rappelle que les Magistrats, dans l’exercice de leurs fonctions, appliquent la loi.
Aussi, il tient à mettre en garde contre de tels agissements et à indiquer que leurs auteurs seront poursuivis et punis conformément à la loi.
Fait à Abidjan, le 19 juin 2025
Le Procureur de la République
Koné Braman Oumar
Magistrat Hors Hiérarchie.
E.KOUAKOU