« Il y aura un accord entre le Rassemblement national et Les Républicains » pour les législatives, avec « des dizaines » de députés LR qui seront « investis » ou « soutenus », a annoncé mardi Jordan Bardella lors d’un entretien au JT de 20h de France 2, sans préciser combien de députés sortants étaient compris dans l’accord. « J’ai lancé un appel à toutes les formations politiques patriotes autour du Rassemblement national qui veulent venir contribuer à cette majorité de redressement » et « je me félicite qu’Eric Ciotti (y) ait répondu favorablement », a poursuivi le président du RN en disant avoir « évidemment échangé » avec le patron de LR et « continuer de le faire dans les prochaines heures, et sans doute un peu plus tard dans la nuit ».
Mais une consultation menée au sein du groupe LR, qui compte 61 membres, n’a enregistré que deux votes favorables, celui de M. Ciotti et celui de sa collègue des Alpes-Maritimes Christelle D’Intorni, a précisé à l’AFP une source du parti.
Le RN veut élargir son socle et Éric Ciotti estime que les LR sont trop faibles et ont besoin d’alliance pour préserver un groupe à l’Assemblée. Les députés sortants qui le suivront n’auront donc pas de candidats RN face à eux. L’accord prévoit aussi ce qu’Éric Ciotti appelle des circonscriptions de conquête pour les LR.
L’objectif est ainsi de combattre le président Emmanuel Macron et former une nouvelle majorité : « un choix courageux », avait tout de suite salué Marine Le Pen après la prise de parole de Ciotti. « Quarante ans d’un pseudo-cordon sanitaire, qui a fait perdre beaucoup d’élections, est en train de disparaître », a fait valoir auprès de l’AFP la patronne des députés Rassemblement national à l’Assemblée nationale.
« Trahison »
C’est le premier accord de ce genre en France entre la droite et l’extrême droite. Le patron de LR a estimé que la droite avait besoin de cet accord pour préserver
sa représentation à l’Assemblée nationale, qui compte aujourd’hui 61 députés, dont beaucoup ne sont pas sur la ligne du président du parti.
L’annonce dans le journal de 13h de TF1, puis la confirmation de M. Bardella, ont marqué un point de non-retour pour une grande partie des responsables LR. Ceux-ci sont montés au créneau pour dénoncer toute alliance avec le parti de Marine Le Pen. De Xavier Bertrand à Jean-François Copé en passant par Valérie Pécresse, Olivier Marleix et même Laurent Wauquiez.
Ce dernier, qui est le président LR de la région Auvergne-Rhône-Alpes, a affirmé qu’il ne « croit pas » aux « alliances » et prône une ligne de « clarté » qui « ne trahit jamais » : « Je vois tous ceux qui sont en train de s’agiter pour faire des coalitions, pour faire des alliances, pour faire des petites combinaisons. Je le dis tout de suite : je n’y crois pas », a ajouté l’ancien patron de LR, qui a annoncé être candidat aux législatives à venir, dans son fief de Haute-Loire.
« Il nous a trahis pour une circonscription, la sienne. Il nous a trahis pour un poste de ministre. C’est misérable, c’est profondément indigne. C’est le cynisme le plus complet en politique », a déclaré Xavier Bertrand, ténor du parti. Selon lui, Éric Ciotti doit non seulement « démissionner de ses fonctions de président tout de suite » mais aussi « être exclu des Républicains »
Le sénateur Bruno Retailleau s’est, lui aussi, désolidarisé en dénonçant une « ligne personnelle » d’Éric Ciotti, tout comme Gérard Larcher. Celui qui est le président des sénateurs LR a accusé Eric Ciotti d’avoir « menti » et de « déloyauté » : il « nous a menti dans un but sans doute personnel vis-à-vis de Nice, mais aussi dans un but qui était de nous placer dans une situation telle qu’on ne puisse pas se retourner », a déploré Bruno Retailleau.
L’eurodéputé François-Xavier Bellamy a estimé que la droite ne doit « pas abandonner ses couleurs ». Les dirigeants de LR ont voulu montrer leur unité et la solitude de M. Ciotti en publiant une tribune dans Le Figaro, assurant que sa décision était « une impasse ».
Au sein du parti, on assure par ailleurs que M. Ciotti « n’a aucun pouvoir d’investir » et que la désignation des candidats LR revient à la commission nationale d’investiture (CNI) où il ne disposerait pas d’une majorité. « Sa décision est donc nulle et non avenue », assure à l’AFP un cadre du parti.
Deux premières défections ont d’ores et déjà été rapportées. La vice-présidente Sophie Primas et le rapporteur général du Budget, Jean-François Husson, ont
annoncé ce mardi qu’ils quittaient le parti gaulliste après l’annonce d’Éric Ciotti. « Une alliance avec le RN aux législatives, c’est bien sûr sans moi ! Je quitte Les Républicains et continue le combat avec le soutien unanime du groupe de Gérard Larcher (président du Sénat) et Bruno Retailleau (chef des sénateurs LR) », a écrit Jean-François Husson sur X.
Sophie Primas a affirmé sur le même réseau social qu’elle faisait le même choix « à contrecœur », appelant la droite à « se reconstruire ».
RFI