La CPI a récemment émis des mandats d’arrêt contre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou et le ministre de la Défense Yoav Gallant pour des crimes commis pendant l’offensive en cours à Gaza. Ces accusations incluent des actes tels que l’affamement délibéré de civils, l’homicide intentionnel et l’extermination ou le meurtre.
Certains accusent la CPI de partialité dans son traitement des crimes de guerre. Ils soulignent que les dirigeants israéliens sont visés, mais d’autres responsables échappent à des poursuites similaires. L’Algérie, par exemple, a exprimé son souhait que le soutien apporté par les membres du Conseil de sécurité à la CPI s’étende à d’autres questions, notamment aux violations dans les territoires palestiniens occupés et aux charniers à Gaza.
La CPI a été créée pour poursuivre les individus accusés de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide. Elle agit comme un tribunal de dernière instance lorsque les États membres ne peuvent pas juger eux-mêmes ces crimes odieux. Israël n’est pas membre de la CPI, mais depuis l’adhésion de l’État de Palestine en 2015, la Cour peut enquêter sur des Israéliens pour des crimes commis dans les territoires palestiniens occupés, dont Gaza.
La CPI a longtemps été critiquée pour ne poursuivre que des dirigeants africains. mais cela a changé avec l’élection de Karim Khan en 2021. Elle a fait l’objet de vives critiques, notamment de la part des dirigeants africains. Ils accusent l’institution judiciaire d’être sélective dans sa démarche. Selon eux, la CPI n’aurait ciblé que des Chefs d’État et des leaders du continent noir. Les poursuites judiciaires en série contre les dirigeants africains ont provoqué la colère de ces derniers, qui expriment le sentiment d’être visés et accusent la CPI de faire une sélection dans sa quête de justice.
Parmi les personnalités poursuivies par la CPI, on retrouve des anciens présidents et des leaders politiques. Par exemple, l’ancien président libérien Charles Taylor, l’Ivoirien Laurent Gbagbo, et Jean-Pierre Bemba, leader du mouvement de libération du Congo, ont tous été poursuivis pour des crimes de guerre, génocides, crimes contre l’humanité et crimes d’agression. Certains notamment Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé, le leader de la galaxie patriotique qui avait pris fait et cause pour l’ancien président ivoirien, ont passé une dizaine d’années dans les geôles de la CPI avant d’être acquittés. Qui va leur rendre ces dix ans de vie derrière les barreaux ? Qui va les indemniser ?
Une grande première
Si sur le cas du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou et du ministre de la Défense Yoav Gallant, les mandats d’arrêt émis par la CPI constituent une grande première, il convient de signaler que les pays occidentaux sont chaque fois prompts à mettre des personnalités d’autres pays sur liste, ou à geler leurs avoirs. Dans le cas des crimes commis par l’armée israélienne à Gaza, depuis le début des massacres, aucun dirigeant israélien, encore moins Benyamin Netanyahou n’est inquiété malgré l’ampleur des tueries. A ce jour, aucun pays européen n’a pris des sanctions contre Israël et ses dirigeants. Hormis, l’Espagne, la Norvège et l’Irlande qui a ont décidé de reconnaître la Palestine comme une Etat. Quant aux Etats-Unis, ils sont partie prenante dans la guerre d’autant plus qu’ils offrent des armes et des munitions à Israël pour tuer des Palestiniens à Gaza.
Si Paris soutient la CPI, le président américain Joe Biden a défendu Israël face à la justice internationale, jugeant « scandaleuse » la demande de mandats d’arrêt contre des dirigeants israéliens. Son chef de la diplomatie, Antony Blinken, a déclaré que la démarche du
magistrat était « une honte ». En France, plusieurs dirigeants de la gauche se sont félicités lundi de l’annonce de la CPI.
En lançant des poursuites contre les deux camps impliqués dans la guerre à Gaza, la justice internationale redore son blason, estime maître William Bourdon, avocat français spécialiste du droit international. « Ce qui est important, c’est que la justice demande à ceux qui sont redevables des crimes les plus graves de répondre de ces crimes, sans être indexée sur les agendas politiques ou les instrumentalisations qui sont si nombreuses dans cette tragédie », explique-t-il à Marine de la Moissonnière du service international de RFI.
« Donc ce qui est affirmé ici, c’est l’indépendance courageuse de la Cour pénale internationale. Ça redonne un crédit considérable à la justice pénale internationale au moment où elle était plus en plus attaquée, où elle était dans une période critique. Ça restaure la crédibilité d’une justice qui de plus en plus incarnait l’illustration du principe du deux poids deux mesures. Une espèce de justice à géométrie variable qui se serait concentrée uniquement sur les Africains. D’aucun dirigeant, même en Afrique ou ailleurs, la dénonçant comme un instrument néocolonial. Mais au-delà, si ces mandats d’arrêt sont ratifiés, ils vont non seulement consolider la crédibilité de la Cour pénale internationale mais au-delà le multilatéralisme, au moment où il est si durement et systématiquement attaqué par les dirigeants populistes dans le monde entier qui, malheureusement, essaiment de plus en plus. »
En conclusion, la CPI doit faire face à des défis complexes liés à la politique, à la justice et à la coopération internationale. Le débat sur les « deux poids, deux mesures » reste d’actualité, la quête d’une véritable justice pour les victimes de conflits persiste.
A.K.